A l'école et en famille préservons la Biodiversité
Yacouba, l’homme qui a fait reculer le désert
Il était une fois… (c’est généralement ainsi que commencent les histoires.)
Dans un petit village du Sahel, vers les années 1960, un jeune homme observe son environnement ressemblant à un désert.
Des années de sécheresse successives provoquent des famines successives.
Yacouba, ce jeune homme, va maintenant s’atteler à une tâche ridicule : travailler la terre aride à l’aide d’une pioche.
Il creusait, creusait et creusait toujours. Son entourage – famille, amis – rigolait de lui, le prenait pour l’idiot du village, et cela le rendait triste.
Il se tut, mais son rêve en valait la peine, il faisait des trous, des trous, et son rêve seul lui était fidèle.
Mais son entourage rigole, rigole, rigole.
Au soleil, alors que la vie disparaît, il œuvre à la tâche.
Ses amis moqueurs, mais le cœur joyeux et les ventres à moitié vides, rigolent, rigolent, rigolent.
Peu importe, son rêve en vaut la peine, petit homme du Sahel sait où il va dans ces terres de désolation.
Il casse les termitières, amasse le fumier, les déchets organiques, enfouit tout cela dans ses trous en battant, battant pour affiner ces matières.
Il ramasse des pierres, des pierres, son rêve le rend fort, ce petit homme.
Le temps presse, il les ajuste, les couvre de terre.
Bientôt, la saison des pluies sera là.
Bientôt, il sera heureux de franchir une nouvelle étape, mais sa famille et ses amis, le cœur joyeux mais les ventres à moitié vides, s’en donnent à cœur joie, ils rigolent, rigolent, rigolent.
Yacouba, petit homme du Sahel, sait que demain il pleuvra, pleuvra et pleuvra encore, mais il est heureux, heureux, car son rêve va bientôt prendre vie.
Demain, il plantera des arbres, des graines potagères et céréalières, mais ses amis et sa famille, le ventre creux, sèmeront eux les graines de légumes et de céréales dans un sol non préparé, pour ne plus avoir le ventre vide.
La saison des pluies est là. Yacouba creuse des rigoles pour canaliser cette eau venue du ciel comme un don, il sait qu’un jour son rêve deviendra réalité.
Évidemment, ses amis rigoleront de voir Yacouba, petit homme du désert, planter des arbres dans ce Sahel où tout se meurt. On ne mange pas des arbres.
Il est triste de cette situation, mais son rêve est grand pour ce petit homme, il n’abandonnera pas.
Il sait que bientôt s’éveillera une autre nature, mais la route est encore longue.
Bientôt, un autre don du ciel lui apportera une aide dont il n’avait rêvé. La vie redémarre, la végétation met du baume au cœur, c’est la fête.
Les arbres de Yacouba se développent, aidés par les termites qui creusent des galeries sans relâche, mélangeant le fumier à la terre. Les spores des champignons dont elles se nourrissent vont bientôt subvenir au besoin de la végétation par les chaleurs qui regagnent en vigueur.
Une nouvelle saison redémarre pour Yacouba petit homme du désert.
Son rêve est toujours là, il est grand !
L’heure est venue de reprendre sa pioche et creuser ce désert impitoyable pour les animaux les plus faibles.
Les habitants protègent maintenant leur pitance pour ne pas succomber avant les prochaines pluies, dans quelques mois.
Sans relâche, il creuse, sa famille et ses amis rient, rient, mais les ventres se creusent. Il est triste, mais ses arbres poussent.
Petit homme devient paysan.
Toujours le même processus : il creuse, il casse les termitières, enfouit du fumier et les déchets organiques.
Il ramasse des pierres, des pierres, son rêve le rend fort, ce petit homme.
Le temps presse, il les ajuste, les couvre de terre.
Bientôt, la saison des pluies sera de nouveau là.
Sa famille et ses amis rient, rient. Il est triste, mais son rêve est grand.
Yacouba voit le résultat de son travail, mais il sait qu’à la saison prochaine, il verra ses arbres plus fort.
Son rêve est grand, il le voit, il le touche.
La saison des pluies arrive, il se presse, les ventres se creusent.
Bientôt, il plantera de nouveaux arbres dans ce désert où rien ne pousse et, désormais, tout se meurt.
Les pluies sont là, bientôt ce sera la fête, les amis de Yacouba sèmeront des légumes et des céréales, pour ne plus avoir le ventre vide.
Le petit homme, lui, plantera des arbres, sèmera ses graines de légumes et de céréales.
Ses amis inattendus creuseront des galeries dans le sol qu’il a travaillé et nourri, il sait maintenant que ces amis-là lui resteront fidèles.
Mais, à table avec sa famille, ses amis, il est triste, mais son rêve est grand. Sa famille et ses amis rient, rient.
La vie est un éternel recommencement, il le sait.
Il creusera de nouveaux trous et tout ce processus évoluera, il le sait, son rêve est grand, c’est ce qui l’anime.
Sa famille et ses amis s’en donneront à cœur joie, mais il sait que ce n’est plus pour très longtemps, car son rêve ne l’a jamais abandonné.
La bêtise humaine lui donnera la frayeur, son rêve qui lui a donné tant d’ardeur au travail est sur le point de partir en fumée.
Mais son rêve est son meilleur ami, il le sait !
Il reprend le travail de plus belle, sa famille et ses amis rient, rient, mais sont maintenant inquiets pour lui.
Mais son rêve est toujours là, il lui est toujours de bonne compagnie.
Le temps passe, il a creusé sans relâche, et bientôt, la vie change, les oiseaux viennent lui apporter son aide, ils déposent des graines dans les terres qu’il a travaillées, la vie est maintenant possible pour d’autres insectes qui, à leur tour, deviennent des amis de Yacouba,
petit homme du désert.
Le village s’intéresse maintenant à ce qu’il fait, il est heureux, les ventres se creusent moins.
Tout ce petit monde s’harmonise, dépendant tous les uns des autres.
Près de quarante années plus tard, Yacouba, petit homme du désert, est dans une véritable forêt inespérée pour sa famille ses amis, le pays et les pays voisins.
Le microclimat de sa forêt lui permet maintenant de subvenir à de multiples espèces d’animaux et les récoltes sont maintenant abondantes. Les ventres du village et des environs
ne se creusent plus, ils ne sont plus vides.
Cette forêt fait maintenant remonter la nappe phréatique, retenant l’eau dans le sol.
Ce petit homme n’a jamais abandonné son rêve.
La vie s’est adaptée, il fallait juste lui donner un petit coup de pouce.
Yacouba, petit homme idiot du village, n’est pas allé à l’école, n’est pas devenu ingénieur agronome.
Il a imaginé transformer la vie dans un désert hostile en une forêt improbable, dans le désert du Sahel qu’il a fait reculer. En dépit de toutes les circonstances qui l’ont affecté, il a poursuivi son rêve et le monde s’est transformé. Il est maintenant devenu un grand homme
reconnu, lui pourtant si petit.
Ses méthodes sont maintenant appliquées dans huit pays du Sahel et ont permis au Niger de
survivre à la famine. Plus de trois millions d’hectares du désert burkinabé ont ainsi été réhabilités.
Dans les années 2000, les présidents de l’Union africaine ont lancé l’idée d’une Grande muraille verte pour le Sahara et le Sahel, elle est approuvée, leur nom s’inscrira dans l’histoire, mais Yacouba Sawadogo n’est pas président.
Un réalisateur lui a rendu hommage. Ne l’oublions pas !
Le 26 septembre 2018, Yacouba Sawadogo est devenu lauréat du Prix Nobel Alternatif (Prix Right Livelihood).
Le paysan burkinabé Yacouba Sawadogo, plus connu comme «l’homme qui a arrêté le désert », reçoit le prix « pour avoir converti en forêts des terres infertiles, prouvant qu’un usage novateur des savoir-faire locaux et indigènes permet aux paysans de régénérer leurs sols ».
M. Sawadogo a toujours insisté sur le besoin vital d’une action
communautaire, déclarant que « les hommes sont les premiers responsables de la dégradation de l’environnement, les principaux causeurs des maux de la nature que nous vivons aujourd’hui. Il est important que chacun d’entre nous œuvre à un environnement plus favorable. »
Quand le rêve est assez grand, les faits ne comptent pas !
Toutefois, désormais sur notre planète, les rêves doivent être en adéquation avec notre évolution dans un monde neutre en carbone qui nous permettra de prospérer, à l’image de Yacouba, petit homme du Sahel, burkinabé, pays des hommes intègres.
« Extrait de mon livre NOUS… Notre maison brûle et nous regardons ailleurs »
Image Futura-sciences.com